samedi 18 juillet 2015

Jacques Halbronn Le Vav conversif en hébreu et la question des noms propres des hommes et des dieux

Problémes de traduction de l'hebreu du fait du Vav  conversif

par Jacques Halbronn

Une des différences majeures entre hébreu biblique et hébreu moderne tient à la fonction du Vav  conversif dont le principe est le suivant: la lettre Vav placée devant un futur en fait un passé et placée devant un passé en fait un futur. Cela pose des problémes de traduction notamment en ce qui concerne les prénoms et leur étymologie.

Un des cas les plus remarquables est probablement le prénom du fils d'Abraham : Isaac (Yitshaq). Comment traduire ce prénom en français? Cetains proposent le futur alors que pour nous, c'est très certainement un passé, pourvu que l'on prenne la peine de se situer dans le bon contexte. Dans genése XVII, 17 on lit Abraham tomba sur sa face et sourit (sic) trad du Rabbinat qui préfére rendre tshq par sourire au lieu de rire, ce qui évite le rapprochement avec ce qui est dit d’Isaac : Dès Genése XVII, 19, on lit à propos du fils : « tu le nommeras Isaac ». Il ne saurait être question de dissocier le nom du fils Ytshaq du fait que son père a ri, Veyitshaq. Etrangement, on se référe le plus souvent au rire de Sarah qui se manifeste un peu plus bas : et qui est cette fois au féminin puisque le sujet est une femme : Vatitshaq et non plus Vayitshaq. XVIII. 12. (cf Ancien Testament Interlinéaire hébreu-français. Alliance Biblique Universelle, 2007)

Comment donc traduite le prénom Isaac . Le texte biblique ne s’en explique pas directement mais le contexte nous conduit à un rapprochement avec ce qui s’est passé juste avant. Il faudrait donc traduire ce prénom par « il a ri », sous entendu « son père, Abraham, a ri » et le moins que l’on puisse dire, c’est que la traduction du rabbinat ne nous y aide pas et ne garde le verbe « rire » qu’à propos de Sarah alors que c’est le même verbe qui aura d’abord servi pour Abraham, quelques lignes plus haut. Certes, on peut vouloir s’en tenir à la traduction littérale sans sous entendu mais ce serait là commettre un contre-sens. On peut aussi vouloir rétablir le Vav et dira que le fils d’Abraham et de Sarah se nomme « Vayitshaq » !

Quels enseignements tirer de ces observations ? Qu’il existe d’autres cas de ce genre où le futur n’est en fait qu’un passé et cela vaut pour nombre de nom débutant par un Iod, souvent rendu par un I, un J ou un Y. Le futur n’est selon nous guère de mise car cela évoque un passé à commencer par Israël. Génése XXXII, 29 : s’adressant à Jacob : « ton nom sera Israel car tu as lutté avec Dieu. » Cette fois, l’explication du prénom qui manquait- si l’on veut- pour Yitshaq est fournie directement mais l’on peut penser qu’elle devait avoir aussi figurer initialement pour Yitshaq.C’est donc à une révision de toute une série de prénoms hébraïques que nous invitons qu’il convient de traduire par un passé et non par un futur, ce qui leur enléve de leur dimension prophétique pour ne plus concerner que des faits déjà accomplis.

Mais on peut aller plus loin et se demander si cela fait sens de nommer Yitshaq le fils d’Abram/Abraham et de Sarah/Saraï. Surtout si l’on compare avec le nom du premier fils d’Abraham (avec Agar), Ismaël, lequel nom signifie selon le même principe non pas il entendra mais il a entendu. Dieu a entendu, ce qui a quand même une autre allure que Il a ri

Genése XVI, 11 :

A Abram :ton fils se nommera « Ismaël parce que Dieu a entendu ton affliction ». Entendu : Shama. Il n’y a pas ici de vav renversif comme dans le prénom mais un verbe au passé. On a donc là trois prénoms Yitshaq, Israel et Ismael qui correspondent à trois verbes qui en sont la clef si ce n’est que dans le cas de Yitshaq, le prénom ainsi proposé semble assez dérisoire, c’est le cas de le dire. On peut se demander si ce prénom n’a pas été proposé ultérieurement en raison d’une lacune du texte biblique dans un souci de parallélisme. Ce qui voudrait dire que l’on ne connaitrait pas le vrai nom du fils d’Abraham et de Sarah.

Un autre cas, particulièrement célébre concerne le nom même du dieu d’Israël, à savoir le tétragramme qui commence également par un Iod, soit un marqueur de la troisiéme personne du singulier au futur mais devenant un passé s’il y a un vav renversif.

Or, les toutes premières phrases du livre de la Genése comportent la forme « Vayehi » compatible avec le Youd Hé Vab Hé d’autant que la plupart des commentateurs rapprochent le tétragramme du verbe être en hébreu.

Genése I, 3 : Dieu dit « Que la lumière soit » Et la lumière fut » Yehi Or Vayehi Or. (Fiat Lux) Le premier Yehi Or est un impératif, le second un constat de ce qui a eu lieu.

On peut se demander si l’origine du tétragramme donc du nom de ce dieu d’Israel n’est pas dans ce passage de la Création où l’on trouve déjà Elohim pour désigner le dit dieu. Vayomer Elohim : Et Dieu dit . Une fois de plus un vav renversif : Vayomer : « et il a dit « alors que l’on a affaire à un futur précédé de la lettre Vav. Il semble d’ailleurs que l’on devrait utiliser la conjonction « et » puisqu’il s’agit du vav renversif. Mais pourquoi si l’on dispose de Elohim faudrait-il que l’on ait aussi le tétragramme ? Par ailleurs, le pluriel Elohim devrait correspondre à un tétragramme également au pluriel. Or, la troisiéme personne en hébreu au futur commence par un yod tant au singulier qu’au pluriel. On pourrait donc prononcer « Yahou » le tétragramme, le « hou » étant la marque de la troisiéme personne du pluriel tant au passé qu’au futur, d’ailleurs. D’autant que les Juifs lisent le tétragramme par une forme de substitution « Adonay » qui est également un pluriel et qui signifie « mes seigneurs ». On ne peut donc dire que le tétragramme ne figure pas dans le premier chapitre de la Génése dès lors que l’on trouve « Yehi » qui en serait la clef.

Ajoutons que l'usage du tétragramme n'est jamais vraiment explicité alors qu'il est récurrent. On n'en trouve un semblant d'explication dans le Livre de l'Exode (III, 15) lors de la rencontre du dieu des Hébreux avec Moïse lequel demande sous quel nom présenter le dit dieu à son peuple (celui de Moïse et celui de ce dieu) . Il lui est répondu. Tu diras "le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob m'envoie vers vous". Tel est mon nom est-il ajouté. Mais un peu plus haut on a une autre version (Exode III, 14) : dis leur " C'est l'Etre invariable qui m'a délégué auprès de vous". Ce qui donne en hébreu "Ehyé asher Ehyé", soit le verbe être à la première personne. Le aleph ici a remplacé le Yod et cette fois on n'est plus au passé mais au présent aussi bien qu'au futur de la première personne du singulier. Ce n'est donc pas ici un pluriel! D'ailleurs, on notera que la forme Yod n'est jamais utilisée quand c'est le dieu d'Israel qui parle mais uniquement quand on parle de lui. Autrement dit, jamais ce dieu ne se présente comme se nommant à la troisiéme personne, que ce soit du singulier ou du pluriel. Le tétragramme Iod Hé Vav Hé n'aura donc jamais été explicité, il est la conjugaison à la troisiéme personne d'une forme à la première personne dont on ne trouve qu'une seule occurence et ce passage est suivi d'un autre où il est demandé à Moïse de présenter ce dieu comme celui d'Abraham, d'Isaac et Jacob, c'est à dire en se référant à une précédente alliance marquée par la circoncision alors que l'alliance avec Moïse, comme il est indiqué dans le décalogue, concerne le respect hébdomadaire du Shabbat. On notera que tant la circoncision que le Shabbat s'articulent autour du 7.


JHB
18 07. 15
PS  Récemment, lors de la journée du CRIF du Ier  novembre 2015, le  grand rabbin de France, Haim  Korsia,   a déclaré que Yitshaq signifiait "il rira". Nous ne le suivrons pas pas plus que Israel ne saurait désigner un futur. Il est clair que le vav conversif   n'est pas maintenu pour les noms propres et qu'il s'agit bien de noms qui évoquent des actes passés:  il a ri, il a combattu etc.  Il est certes tentant d'instrumentalisre ces cas particuliers pour  traiter du futur  et  nous savons à quel point  cette tentation existe dans le Midrash  (cf notre ouvrage Le Monde Juif et l'Astrologie. Histoire d'un vieux couple, Milan, Ed. Arché, 1985)

mercredi 15 juillet 2015

Jacques Halbronn L'identité des Juifs et des Arabes en France face au phénoméne de diaspora

L'identité des Juifs et des Arabes en France face au phénoméne de diaspora
par Jacques Halbronn


I Le déni des Juifs de France quant à leurs origines migratoires


On lit souvent que la présence juive en France est très ancienne et qu'elle l'est bien davantage que celle des Arabes. Mais les Juifs qui vivent aujourd’hui en France sont-ils pour autant culturellement les descendants de ces Juifs de "souche" française auxquels ils affirment se rattacher? On est un peu dans le gag de Nos ancêtres les Gaulois.
Tout le monde sait que la communauté juive de France est très largement constituées d'immigrés issus de l'Est de l'Europe et d'Afrique du Nord, c'est à dire d’ environnements culturels, linguistiques, politiques très différents de ceux qui concerne la France métropolitaine et la politique de conquête, de colonisation ne transforme pas en Juifs français des juifs maghrébins même si en effet ces immigrés juifs trouvent en France un noyau juif très anciennement à demeure, s’exprimant dans la même langue qu’eux le français. .Mais la pratique d’une même langue ne signifie pas le partage d’une même culture, d’une même mentalité. L’apprentissage d’une langue ne suffit pas à garantir l’intégration pas plus d’ailleurs que l’obtention d’un même statut juridique ou le fait de cohabiter dans une même ville dont on sait par ailleurs qu’elle comporte des facteurs de différenciation sociale..
Dans ce même ordre d'idée l'on pourrait dire que les Juifs qui viennent à présent s'installer en Allemagne ne font que perpétuer une présence juive séculaire dans ce pays alors que les Juifs de souche allemande ont quasiment disparu de la dite Allemagne, pour les raisons que l’on sait. Force est donc de parler d'une diaspora judéo-maghrébine en France à l'instar d'une diaspora islamo- maghrébine. De même, on pourrait parler de la diaspora judéo-polonaise en France mais aussi en Israël, ce qui vaut d'ailleurs également pour la diaspora judéo-maghrébine en Israël. On noter qu’en Israël, le poids des origines diasporiques est considérable.
Il serait donc heureux que l'on commençât – mieux vaut tard que jamais ! - à reconnaitre la centralité, la prééminence des Juifs de souche française en France, lesquels constitue un noyau dur, correspondant à une réalité objective, à une filiation et non à un choix personnel, subjectif, celui de l'immigrant. Le juif arrivé en France, récemment, se situerait dans un processus de conversion et d'appropriation qui ne correspondrait pas vraiment à une image clair de l'être juif.
Nous trouvons pathétique qu'un leader censé représenter la communauté juive de France évoque des ascendants étrangers. Si encore, ces Juifs de souche française (les « Israélites ») avaient disparu, on pourrait à a rigueur admettre un tel tour de passe-passe. Mais ce n'est pas le cas et le fait que ces Juifs soient ne minorité n'y change strictement rien à moins que l'on prenne le mot "représenter" pour indiquer à l'image de la communauté juive actuelle. Mais est-ce là une approche bien raisonnable quand on revendique une ancienneté de plusieurs siècles pour les Juifs de France? Il serait plus sage de traiter cette "minorité" des Juifs de souche française (alsacienne, comtadine notamment) comme une aristocratie. Nous pensons qu’un certain accent mis sur le sionisme tend à évacuer la question de ces israélites français, d’en miner la légitimité à gouverner la communauté juive de France. Il y a là une conflictualité non avoué. Il est vrai que les Juifs étrangers sont venus en France au nom d’une certaine idée de la France bien plus que pour venir rejoindre leurs coreligionnaires déjà installés.
On ajoutera que l’antisémitisme est en partie lié à une présence juive perçue comme étrangère qui vient remettre en question –ce qu’avait bien compris Théodor Herzl- un certain modus vivendi de la coexistence des Juifs et des Non Juifs en un lieu donné. Ce que les gens appellent « juif » est en fait une certaine façon de vivre en un lieu donné et qui n’est pas nécessairement exportable. En ce sens, la judéophobie se confond avec la xénophobie et il est peu souhaitable de compliquer les choses, tout comme la judéité est inévitablement marquée par la culture familiale d’origine. Les Juifs assument-ils vraiment l’idée d’un peuple qui n’a pas besoin d’une terre mais qui dispose d’un dieu alors que certains peuples ont une terre mais point de dieu qui leur soit propre ? On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre ?

II La question du parallèle entre communautés juives et musulmanes

Le terme de diaspora serait donc assez illusoire dans le cas juif et il est en fait anachronique et ne faisait véritablement sens que dans l'Antiquité mais il a été réactivé anachroniquement dans une perspective sioniste. Il est donc bien plus aisé pour les Juifs de ne pas se référer à une origine commune et c'est bien la France qui est leur véritable dénominateur commun par-delà leurs différences/ En revanche, pour les Musulmans - et notamment les personnes issues de l'immigration maghrébine, sur deux ou trois générations- la notion de diaspora et de langue d'origine est bien plus prégnante. Certes, il s'est créé artificiellement un parallèle avec la référence à l'Etat d'Israël qui parfois tend à devenir un nouveau ciment pour les Juifs de France. Le parallèle est certes renforcé par l'existence d'une "loi du retour" permettant à chaque juif de demander la nationalité israélienne. Le problème de la langue est révélateur d'un certain artifice car pour la plupart des juifs de France, l'hébreu n'est pas une langue qui se pratique, qui se parle, au quotidien mais qui relève d'une référence que l'on pourrait qualifier de liturgique, d'artistique, de liturgique. L'hébreu des Juifs de France en reste au stade d'un signifiant quasiment vide (vidé) de tout signifié et qui se perpétue intangible ment, sans changer un iota. Le prix à payer pour vivre sous le régime de laïcité sera donc bien plus faible pour les Juifs que pour les Musulmans, ce dont les Musulmans n'ont pas forcément conscience.
Les événements de l'Eté 2014 lors de l'intervention israélienne à Gaza ont établi un faux parallèle entre les manifestations juives et arabes dans Paris qui explique ce qui s'est passé au début de 2015. On peut en effet se demander si les Juifs de France n'ont pas du fait de leur attachement affiché pour Israël déclenché un processus parallèle de la part des Maghrébins de France,
Et en même temps, le comportement des Juifs par rapport à Israël aurait pu être influencé par celui des Maghrébins en voulant donner un sens au mot diaspora. Il suffit cependant d'aller sur les radios liées à ces deux "communautés" pour que la différence saute aux yeux. L’idéologie sioniste conduit à une telle représentation anachronique de la diaspora juive. De nos jours, il y a des diasporas juives issues de toutes sortes de lieux, parfois d’Israël (les « Yordim », par opposition aux Olim, ceux qui sont montés (Alya) et non descendus (Yerida), parfois de France ou d’ailleurs .
Sur la "fréquence juive", l'hébreu joue un rôle quasiment décoratif – des chants comme d’ailleurs à la synagogue sauf que ce ne sont pas les mêmes- alors que sur "Radio Orient", les auditeurs s'expriment de préférence en arabe (dialectal ou pas) et sont tous peu ou prou bilingues.
Actuellement, il serait bon que ceux qui parlent au nom de la communauté juive de France réévaluent leur ordre de priorité et modèrent des propos qui ne peuvent que faire empirer les relations judéo-arabes en France tant en ce qui concerne le conflit israélo-palestinien qu'en ce qui concerne les exigences de la laïcité.
Le rapport des juifs à la question du Foyer (Home) Juif qui prendra en 1948 le nom d'Israël et qui précédemment était désigné par les Juifs sous celui de Palestine doit être resitué historiquement, à savoir avant ou après cette création . Le CRIF (Conseil Représentatif des Institutions Israélites de France) fut fondé en 1943-44 soit quatre ans avant la création proprement dite de l'Etat d'Israël. Il était bien normal à l'époque de placer cette question en bonne place dans les objectifs à atteindre. Il en est de même de l’hymne israélien (Hatikva, l’espérance) bien antérieur (1878) à la création de l’Etat ou même à l’instauration d’un Foyer Juif sous mandat britannique. Mais une fois cet Etat fondé, les priorités auraient dû évoluer. Or 70 ans plus tard, cette question occupe encore l'horizon du CRIF alors même qu'il n'encourage pas pour autant l'émigration (Alya) vers Israël mais qu'il prend tout de même des positions susceptibles de provoquer des tensions avec la communauté arabo-musulmane. Là encore, force est de constater comme sur le plan religieux des positionnements assez peu cohérents.
On a l’impression que le judaïsme contemporain à la française est constitué de divers ingrédients, à la façon d’une salade niçoise. Un peu d’Israël, ; un peu de Kashrouth, un peu d’hébreu (que l’on sait tout juste lire avec les voyelles ajoutées), un peu de prières et de bénédictions, un peu d’histoire de France, un peu de laïcité et de diaspora, au nom d’une tradition fourre-tout , fourbis, un patchwork- jugée indivisible, à prendre ou à laisser. Cela fait un peu désordre.
Il a manqué au judaïsme une contre-réforme face au christianisme et c’est précisément ce que nous tentons ici d’établir et cela passe par une réflexion sur le distinguo entre le contextuel et le structurel, et c’est ce qui manque cruellement à ceux qui prétendent aujourd’hui en être les porte-paroles.


III La différence identitaire entre Juifs et Arabes.

Il ne faut pas se voiler la face, l'identité juive est quand même plus complexe que l'identité arabo-musulmane et paradoxalement cela explique la faveur dont jouit le régime assez ambigu de la laïcité auprès des Juifs de France.
Les arabo-musulmans n'ont certes pas en effet à endosser le lourd passé de persécutions qui est le lot de tant de Juifs, et n'ont pas connu le marranisme lequel n'est d'ailleurs sans s'apparenter au laïcisme à la française. Leur rapport à la France est sensiblement différent : pour les maghrébins (arabes et kabyles), la France a été l’ennemie, le colonisateur alors que pour les Juifs, elle apparait comme un havre, un refuge, en concurrence avec Israël d’ailleurs. Cette France qui a fait des juifs d’Algérie des citoyens français à part entière dès 1870
On comprend l'incompréhension des immigrés maghrébins, quelle que soit leur génération, pour une certaine forme de dissimulation qui passe aussi par une stratégie d'assimilation. On parlait autrefois de « Juifs assimilés » et l’on se disait pudiquement Français « d’origine juive ». . En ce sens, nous pensons que la laïcité pourrait être qualifiée de déni identitaire. Nous ne voyons pas pourquoi n’existerait pas un certain communautarisme plutôt que de fausses ressemblances, notamment autour de la question de « Dieu ». Ce n’est pas tant aux musulmans de se mettre en retrait qu’aux Juifs de se mettre plus en avant en prenant, selon nous, leurs distances, par ailleurs, avec les enjeux du Proche Orient., en cessant de se présenter comme une Diaspora au même titre que celle des Maghrébins, ce qui est une pure fiction parfaitement anachronique qui nie l’histoire réelle de la communauté juive de France laquelle, pour la plus grande part, ne concerne ni la France ni la Palestine en rappelant que les Juifs français ne parlent pas l’hébreu moderne mais balbutient dans un hébreu archaïque et intemporel, ce qui n’incline pas vraiment à analyser les textes en profondeur.




IV Les arabes et le spectacle de la réussite juive

La judéophobie arabo-musulmane se plait – se complait- à dresser la liste des Juifs qui ont accès à des postes de pouvoir. Il y a en effet deux modes d'intégration, l'une quantitative, l'autre qualitative () Les arabo-maghrébins ont été plus effectifs au prisme de la première que de la seconde et sont cinq ou six fois plus nombreux que les juifs issus de l'immigration, leur communauté est bien plus homogène. culturellement et ses repères sont plus réels. En revanche, ils ne sont pas montés aussi haut que les Juifs dans la hiérarchie sociale. On parlera d'intégration féminine et masculine, l'une visant à se conformer aux normes, l'autre à les déborder par le haut et non par le bas. Rappelons par ailleurs que notre société est plus opérationnelle pour veiller aux minima sociaux qu'aux maxima, les uns étant normatifs alors que les autres impliquent un certain dépassement. Force est de constater que les franco-arabes profitent davantage des minima que des maxima.
Il ne faudrait pas réduire l'ascension sociale à l'obtention de postes et confondre la cause et l'effet. Il ne s'agit pas de s'assurer d'un certain quota de postes à tel ou tel niveau, comme le soutiennent notamment des féministes. La véritable hiérarchie ne fonctionne pas sur la base de postes et les postes ne font que sanctionner une certaine qualité. Un tel procès de la part des arabes à l’encontre des Juif, en France, doit cesser ! Mais cela passe par la reconnaissance d’une certaine exception juive qui n’est pas ici une question de pratique communautaire mais tient à de fortes personnalités, dans les domaines les plus divers, qui constituent un atout majeur pour la France du XXIe siècle, qui dispose de la plus forte présence juive en Europe (Russie comprise), une Europe qui a bien failli faire ou laisser disparaitre tous ses Juifs, il y a un peu plus d’un demi-siècle, ce qui fait des Juifs qui y vivent de nos jours des survivants, des rescapés, y compris pour ceux qui sont nés après la Shoah. Signalons en passant que les Juifs sont aussi encombrants aux yeux des féministes. Alors qu’ils ne représentent qu’une toute petite portion de la société, le nombre de fortes individualités issues de leur rang, connues depuis le XIXe siècle dépasse très largement celui des femmes lesquelles constituent une bonne moitié de l’Humanité !
Il nous apparait que les arguments mis en avant au nom de l'égalité – c’est le Démos - alimentent un certain antisémitisme. On passe en effet aisément des protestations quant à la suprématie jugée inadmissible des hommes (par opposition aux femmes), en termes de postes, de promotions à celle des Juifs. On l'observe notamment sur Internet sur le thème "les juifs à la télévision" avec des documents qui sont l'occasion d'une judéophobie débridée. Au nom de la lutte contre le 'racialisme" (sic), l'on voudrait établir un numerus clausus dans les média. Etrangement, ces musulmans qui revendiquent le droit d'afficher leur appartenance religieuse instrumentalisent la laïcité comme un moyen de se protéger du pouvoir juif.
On s’interrogera par ailleurs sur la possibilité pour un Musulman de vivre dans un milieu qui ne le serait pas. On peut se faire plusieurs idées de la tolérance : une chose est d’accepter que l’autre ne suive pas la même religion que nous, une autre d’accepter qu’il n’ait pas les mêmes pratiques que nous, comme de manger du porc ou de boire du vin. Faut-il, comme semblent le souhaiter certains musulmans, que l’on s’abstienne de boire du vin en leur présence, par exemple, alors qu’ils se trouvent dans un lieu public ? Si certains pratiquants ont une sensibilité exacerbée, ils risquent de se sentir agressés par le seul fait d’un non respect de tel ou tel interdit. La notion de blasphéme ne vaut selon nous qu'à l'encontre du membre de telle ou telle communauté religieuse. Un non juif qui ne respecte pas le Shabbat ne risque pas l'excommunication et un non Musulman n'a aucun devoir au regard du ramadan. Traiter un non musulman de blasphémateur, c'est le traiter comme s'il s'agissait d'un Musulman renégat.
JHB
15 07 15

jacques Halbronn, Hébreux et Arabes en France


Le faux parallélisme  entre  Hébreux et Arabes en France
Le ciment qui relie entre eux les Juifs de France est la France d'autant plus qu'ils ne sont pas, le plus souvent, de souche, d'origine française tout comme c'est Israël alors même que ce pays leur  reste largement étranger et qu'ils n'ont avec lui que des rapports touristiques, marginaux. A contrario, pour les Arabes en France,  le ciment du référentiel français est moins déterminant puisqu'ils sont liés entre eux par leur histoire familiale sur deux ou trois générations. On ne peut donc effectuer des comparaisons à la légère sous prétexte que l'on parle d'une diaspora juive et ce notamment en Israël mais c'est là une fiction car une diaspora qui dure depuis des siècles est-elle encore une diaspora si ce n’est en tant que mythe ?
On peut d'ailleurs se demander si ce ne sont pas les Juifs français qui ont pris modèle sur les Arabes français.
Ajoutons qu'il existe des Juifs de "souche française" qui sont une minorité au sein de la communauté juive de France et qui sont les vrais descendants des Juifs émancipés à la Révolution. Mais il ne semble pas que ce soient eux qui soient appelés à représenter le judaïsme français. D'ailleurs les parents  de ces Juifs-là ont été relativement épargnés sous l'Occupation.
Le point commun entre la plupart des Juifs  et des Arabes de France - on laisse ici la dimension religieuse- c'est justement l'immigration et ses stigmates à savoir se faire passer pour ce que l’on n’est pas, basculer dans une certaine forme de déni qui confine au marranisme, sous sa forme de laïcité. Une certaine haine d’un tel subterfuge ne joue-t-elle pas comme miroir entre les deux communautés marquées l’une et l’autre par l’immigration et le déracinement une fois que l’on a relativisé le poids du judaïsme de souche française qui n’a pas choisi la France mais qui en émane.
 Mais, comme on l'a dit,  la France joue un rôle unificateur pour ses Juifs qui ne lui est pas demandé pour ses Arabes. La laïcité n’aura  donc pas la même portée pour ces deux "communautés".
Quelle est alors la solution pour intégrer des éléments étrangers récemment arrivés? Ce que l'on oublie quand on aborde la question des précédents intégrations, c'est que la société française fut au cours des deux derniers siècles en pleine mutation, ce qui facilita  singulièrement l'égalité entre ses membres puisque tout le monde était peu ou prou logé à la même enseigne du fait même du changement en cours.  Mais, lorsqu'une société se fige, elle perd ipso facto - ou en tout cas compromet- ses facultés d'intégration.
Ce n'est pas par hasard si la notion d'égalité est contemporaine de celle de révolution car la révolution est la garante de l'égalité. C'est pourquoi les changements que nous proposons ici  sont susceptibles de favoriser une meilleure intégration à tous les niveaux, y compris en ce qui concerne les jeunes générations.