jeudi 12 mai 2016
Les piéges et les troubles de la conditon d'immigré et d'étranger. La communauté juive
Les piéges et les troubles de la condition d'immigré et d'étranger. La communauté juive.
par Jacques Halbronn
Il n'est pas facile de vivre dans une société à laquelle on est peu ou prou étranger, dont on ne maitrise pas pleinement et en quelque sorte instinctivement tous les codes. Et rien n'est plus ridicule quand on est étranger que de vouloir faire des observations à des "autochtones" sur leur non -respect des régles.
Celui qui est en situation d'étranger - à quelque titre que ce soit et même s'il est installé dans le pays (la région, la société) concerné de longue date- devrait s'astreindre à un devoir de réserve car avant de réagir il convient qu'il se demande s'il a parfaitement compris les raisons qui font qu'Un tel agisse de telle ou telle manière. Et dans le doute, mieux vaut qu'il adopte un profil bas. Mais sur des points qui lui paraissent totalement évidents- mais qui ne le sont pas pour autant nécessairement-l'étranger risque de se lâcher et c'est alors l'accrochage qui menace. D'ailleurs, il suffit de se référer au domaine de la langue, de son usage, de sa prononciation, pour que l'étranger prenne conscience que des choses lui échappent et qu'il ne parvient pas à la perfection souhaitée, ni sur le fond ni sur la forme.
Le probléme se pose de façon singulièrement épineuse en ce qui concerne la communauté juive de France, laquelle est fort loin d'être homogéne. Au sein de cette communauté, l'on doit distinguer entre Juifs de souche française et Juifs issus d'une immigrations relativement récente et il ne serait pas de bon aloi de souligner le fait que tous les Juifs de toute façon viennent d'ailleurs pour tenter de relativiser les différences, ce qui ne ferait qu'aboutir à une fragilisation de la dite communauté aux yeux des autres communautés.
Qu'est ce qui distingue dans leur rapport à la France les Juifs de souche française de ceux qui sont "arrivés" en France ou dont les parents se sont installés, qu'ils viennent d'Afrique du Nord ou de Pologne. Le probléme se pose d'ailleurs à peu près de la même façon si l'on veut distinguer dans la société israélienne les "sabras", de souche "palestinienne", et les "Olim", c'est à dire ceux qui sont "montés" en Israël. La comparaison entre la France et Israël n'est nullement gratuite, ici.
En effet, pour bien des Juifs venus en France, l'option israélienne existait également- sans parler d'autres possibilités. Autrement dit, le choix de la France n'était pas le seul qui s'imposât. Et avant que la décision "finale" ne soit prise, il y avait "embarras" du choix. Autrement dit, dans l'esprit de ces Juifs parvenus en métropole, auront pu cohabiter, plus ou moins longuement, tous ces choix encore plus ou moins virtuels. Autant de problématiques qui, a contrario, n'auront pas été vécues par des Juifs de souche française. Le moins que l'on puisse dire c'est que pour ces Juifs de souche, la France n'était pas une "option" mais une histoire à assumer et à poursuivre.
A présent, abordons la question assez brulante de la double allégeance- dans les paroles sinon dans les actes- d'une partie de la communauté juive de France- si tant est que le singulier fasse sens ici. On l'aura compris, la possibiité d'une telle dualité trouve son explication dans ce questionnement identitaire que nous avons évoqué et qui, de fait, va se poursuivre après l'installation en France puisque les deux options France et Israël auront plus ou moins longuement coexisté dans l'esprit des intéressés. Comme ils le reconnaissent eux mêmes, ces Juifs qui ne voient pas ce qui ne "colle" pas dans leur déclaration d'amour à Israël, n'ont pas conscience du probléme. Et si l'on se met à leur place, l'on comprend pourquoi.
Admettons donc qu'un portion appréciable des juifs de France, aujourd"hui, n'aient pas réglé ce probléme identitaire. Dont acte. Mais ne faut-il pas en tirer certaines conséquences? Est-ce que ces Juifs là sont bien placés pour représenter la communauté juive de France? On nous répondra qu'en tout cas ils sont "représentatifs" de l'état d'esprit d'une partie de la dite communauté.
Une telle réponse est-elle en mesure de nous satisfaire? Nous ne le pensons pas car se pose une question d'ordre stratégique à savoir s'il est bon que ces Juifs là se mettent en avant aussi représentatifs pourraient-ils prétendre être. Pour reprendre une formule célébre : 'Est-ce "bon" pour les Juifs de France qu'il en soit ainsi, c'est à dire que la plupart des dirigeants de la communauté juive de France correspondent à un tel type de mentalité?*
Ne faut-il pas réfléchir en termes qualitatifs plutôt qu'en termes quantitatifs pour asseoir la légitimité du leadership au sein de la communauté juive de France? Que l'on songe aux familles royales ou princières;: la question est avant tout dans la filiation objective et non dans ce que les uns ou les autres pensent et croient, déclarent ou affirment dans le genre "je me sens très français".
On pourrait d'ailleurs s'interroger également en ce qui concerne le rapport à la Shoah et étrangement la célébration du "Jour de la Shoah" et celle du "Jour de l'Indépendance d'Israël" se suivent de peu. Là encore, Est-ce une "bonne chose" que d'insister sur le sort de tous ces Juifs de France qui ont périi en camp de concentration et dont la plupart n'étaient pas "de souche française" pour des raisons qui s'entendent assez aisément, du fait même de leur intégration dans le paysage français. En revanche, il n'est pas mauvais de rappeler que les Juifs qui auront été le plus atteints par les décrets de Vichy ont bien été les Juifs de souche française, ceux qui étaient des citoyens à part entière et non des étrangers, même naturalisés. Ce sont d'abord ces Juifs de souche qui auront été trahis par la France, ceux dont les aieux avaient été "émancipés" à la fin du XVIIIe siècle et qui constituent la colonne vertébrale de la présence juive en France (cf le dernier livre de BHL) Avec quelle désinvolture ces Juifs immigrés traitent-ils ces "Israélites" en les reléguant au second plan?
Double inconséquence de la part de la direction actuelle de la communauté juive de France: d'une part son rapport ambivalent entre deux "amours", la France et Israel, qui pourrait être carrément condamné pour infidélité s'il s'agissait d'un couple -comment la France est-elle supposée vivre elle un comportement aussi léger?- et d'autre part, une attitude aussi cavalière vis à vis des Juifs Français de souche. Qui ne voit que cette communauté joue actuellement un jeu dangereux sinon suicidaire, et en tout cas bien imprudent?
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