samedi 18 septembre 2021
jacques Halbronn La dialectique entre le producteur et le consommateur au prisme du rapport Hommes -femmes.
Jacques Halbronn La dialectique entre le producteur et le consommateur au prisme du rapport Hommes-femmes
Depuis longtemps, nous avions émis la pensée selon laquelle celui qui prend trop de plaisir à gouter ce que le monde a à lui offrir ne sera pas en mesure de puiser en lui même sa source de plaisir. Récemment, nous avons mis l’accent sur l’éclectisme qui caractériserait la psychologie féminine. Nous opposions le philosophe et le « prof de philo ». Celui qui connait trop bien le monde qui l’entoure risque de ne pas se connaitre (« Connais-toi toi même » du frontispice du Temple de Delphes, attribué à Socrate., c’est à dire de ne pas connaitre son « propre mode d’emploi ». Il est plus facile d’apprendre à utiliser une machine qu’à activer ses propres facultés car dans un cas, on est dans le visuel et dans la communication avec autrui alors que dans l’autre, on est livré à soi-même, ce qui commence avec l’apprentissage du langage qui précéde celui de la lecture. Est-il souhaitable qu’un enfant apprenne à se servir de tel appareil au lieu d’exploiter ses propres ressources?
Le contraste est remarquable entre ce que le monde a à nous offrir et ce que nous avons à offrir au monde! Peut-on se plaire dans la compagnie des oeuvres littéraires, plastiques, musicales et en même temps engager une recherche personnelle ne se réduisant pas à former sa bibliothèque ou sa discothéque? Nous posions déjà cette question en 1964 en classe de philo: « est ce que la culture ne doit pas déboucher sur la création? » Il y a là un sevrage nécessaire mais après tout, ne convient-il pas que chacun suive sa propre voie et n’emprunte pas celle qui ne lui correspondrait pas? That is the question!
La question de la « culture » semble bien se situer au coeur du débat car il y a d’un côté les producteurs et de l’autre les consommateurs qui ne jouent pas dans la même cour même s’il y a interaction, interdépendance. Le contraste est frappant entre celui qui vit pour son oeuvre et celui qui se complait à jouir de toutes les facettes de ce que la Culture lui offre, qui collectionne toutes sortes d’oeuvres de toutes sortes d’époques et de pays.. C’est ainsi que les femmes sont fort nombreuses dans le public des concerts et sur scéne et qu’elles ne sont qu’un tout petit nombre parmi les « compositeurs ». Cela ne devrait pas surprendre outre mesure, il nous semble. Contraste entre l’infini de k’ensemble des oeuvres disponibles dans les musées, les bibliothèques et l’enjeu d’une recherche personnelle spécifique étalée dans le temps. Mais alors pourquoi une telle division du travail fait-elle tant probléme encore en ce début de XXIe siècle, au point de devenir un sujet tabou? ne serait ce pas le symptome d’une mauvaise conscience sinon d’une mauvaise foi?
Pour mieux nous faire comprendre, prenons l’exemple de la prédation Il y a deux types d’oiseaux de proie ceux qui tuent et ceux qui consomment la proie, la charogne- abandonnée- on les appelle des charognards. Voyons ce qu’on trouve sur Wikipedia à propos du « vautour charognard »:
« C’est un charognard, se nourrissant essentiellement de cadavres d’animaux et des déchets qu’il repère en survolant la savane et les alentours des habitations humaines, y compris les décharges et les abattoirs. Il se déplace souvent en troupe et est très abondant. Dans une grande partie de son territoire, il y en a toujours plusieurs de visibles haut dans le ciel à n’importe quel moment durant la journée. »
Il y a comme un lien entre le charognard et la mort comme si cette bête avait peur du vivant qu’il était incapable d’atteindre.
Cette parabole du charognard que nous proposons exprime assez bien le décalage entre le producteur et le consommateur de culture, en prenant le terme culture au sens large de production intellectuelle, artistique, scientifique. En fait, il y a là plusieurs acceptions du mot « création »: une compilation, une anthologie ne peuvent-elles pas être qualifiées de « »créations »? Celui qui programme un récital à partir de pièces de divers « compositeur » n’accomplit-il pas, à sa manière, un acte « créatif »? D’ailleurs, le terme même de « compositeur » prête à confusion puisque composer c’est combiner, arranger, ordonner, ce qui peut relever du domaine du « charognard », de celui qui accommode différents mets d’origines diverses, pour en faire un « plat »? On touche là à la notion de syncrétisme, d’une unité instaurée après coup à partir d’éléments de sources très variées, dans le temps et dans l’espace. A contrario, ce qui est vivant déconcerte: cela bouge encore, cela n’est pas terminé, « parfait ». Ce qui est mort est plus facile à gérer. On sait qu’en musique, les concerts accordent bien plus de place aux compositeurs morts qu’aux vivants.
Autrement dit, l’instinct des producteurs ne serait pas celui des consommateurs, cela relève de logiques différentes. Le producteur n’a pas une mentalité de charognard et le consommateur est habitué à se plaire à des produits déjà reconnus, établis. Le producteur a l’instinct du chasseur alors que le consommateur « chasse » le producteur, entend s’approprier son gibier. Le consommateur arrive en second. Il met en forme ce que le producteur a su attraper au vol. De la même façon, la femme transforme le sperme de l’homme en un embryon qui donnera naissance à un « nouveau né ». Elle arrive en second et le sperme ayant jailli dans son vagin n’est plus de même nature que celui qui circulait chez l’homme avant le stade de l’éjaculation… On retrouve ici la dialectique de la matière et de la forme. Et rappelons le début du Livre de la Genése: On notera que « Dieu » ne sait pas exactement où son action, son impulsion va le mener. Il constate, après coup, que c’est « bon »
Dieu dit: « Que la lumière soit! » Et la lumière fut.
ד וַיַּרְא אֱלֹהִים אֶת-הָאוֹר, כִּי-טוֹב; וַיַּבְדֵּל אֱלֹהִים, בֵּין הָאוֹר וּבֵין הַחֹשֶׁךְ. 4 Dieu considéra que la lumière était bonne,
Mais le texte nous dit
אֱלֹהִים, מְרַחֶפֶת עַל-פְּנֵי הַמָּיִם. 2 Or la terre n’était que solitude et chaos; des ténèbres couvraient la face de l’abîme, et le souffle de Dieu planait à la surface des eaux.
Cela signifie qu’avant cette « création », il existait déjà quelque chose qui allait devoir être transformé. Cette « création » correspond donc bien à un second temps et en ce sens « Dieu » s’apparenterait à un charognard qui se sert de ce qui est déjà là, qui préexiste et ce « chaos », c’est le vivant.
Le travail de ces deux poupulations doit être distingué. Le charognard explore tout ce qui est resté à l’abandon – il n’a plus qu’à se servir – alors que le vrai chasseur, le vrai prédateur est à l’affut d’une proie en mouvement. Il peut mettre beaucoup de temps pour y parvenir et ne saurait se contenter de ce qui traine ici et là et se présente inerte sur son chemin. On aura compris que les motivations ne sont pas les mêmes et que le ressenti des uns ne sera pas celui des autres. Le charognard ne connaitre pas le plaisir d’un contact premier avec un réel sauvage, il devra se contenter de ce qui a déjà été défloré. L’avantage pour le charognard, c’est qu’il a devant lui un champ illimité de possibles, puisqu’il a mis la barre plus bas alors que le prédateur devra se surpasser pour vivre l’expérience du « premier contact », de la première fois. Le charognard est condamné à n’arriver qu’au second rang.
JHB
18 09 21
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