mardi 12 juillet 2016

Jacques Halbronn Le contenant et ses contenus. Une révolution copernicienne pour le XXIe siècle




Le contenant et ses contenus. Une révolution copernicienne pour le XXIe siècle.
par  Jacques  Halbronn

Nous traversons une crise de l’idée de contenant, laquellle couvre pourtant un champ extrêmement large. Le contenant c’est ce qui rassemble, ce qui constitue un ensemble. Le systéme solaire est un contenant, en ce sens qu’il englobe un certain nombre de planétes (astres errants, non lumineux par eux-mêmes mais uniquement par reflet. On peut donc parler de révolution copernicienne dès lors que l’on entend rétablir le contenant au centre et le contenu autour.
Il nous apparait que les enjeux les plus importants pour l’Humanité, au cours des 12 000 ans écoulés, soit depuis le début du néolithique (cf Jean Guilaine. La seconde  naissance de l’homme, le néolithique, Paris, Ed . Odile Jacob, 2015) auront consisté à l’édification d’empires, donc de contenants.  Certes, les contenus précédent-ils les contenants mais la civilisation se met en  place lorsqu’elle organise divers contenus au sein d’un seul et même contenant, ce qui correspond au fond à un processus structurel. Les contenus appartiendraient ainsi  à un âge pré-structurel.
Selon le principe du rasoir d’Occam,  il importe de rechercher l’économie et  il est clair que le principe du contenant englobant une multitude de contenus est voué à y contribuer sérieusement.  Cela se manifeste notamment par des « regroupements », comme on l’a vu récemment pour la diminution du nombre de régions en France. Le fait de rassembler des éléments qui autrefois n’étaient pas censés se côtoyer exige bien entendu un certain sens de l’harmonisation de la part de l’autorité en charge, à savoir l’Etat. Mais tout nouvel essai de rapprochement est doté d’une certain vertu créatrice, contrebalançant le risque de sclérose et de routine; et donc de médiocrité/médiocratie.
On peut certes regretter que l’anglais, par exemple, ait emprunté tant de mots au français depuis le XIe siècle (1066, il y a 950 ans) mais cela conduit l’anglais  à un exercice de cohabitation, signalé par Walter Scott qui n’est pas dénué d’intérêt en ce qu’il  vient perturber l’érgonomie de l’anglais. Toute forme de colonisation,  d’occupation,   ne conduit-elle pas quelque part à  perturber un certain ordre établi, ce que nous tendons à considérer comme salutaire?.
Les héros de notre Histoire ne sont-ils pas  les bâtisseurs d’empires, donc de « contenants »  même si d’aucuns n’hésitent pas à qualifier les empires de « prison des peuples » (empire austro-hongrois)/ Mais hâtons-nous de préciser que de tels ensembles ne sauraient se  limiter  au plan  territorial ni même politique mais recouvrent  les domaines de l’art, de la Science, de l’économie etc.
Rien n’est plus excitant pour l’esprit humain que les rapprochements, les combinaisons inédites  qui sont autant d’aventures sans que cela vienne pour autant compromettre l’intégrité de chaque  composante. Il y a  bien sûr là un équilibre à trouver, à rechercher. A contrario, que dire de  l’incapacité  de certains  responsables à rapprocher telle ou telle entité pour constituer un  « rassemblement » plus ample? Ils n’ont pas la fibre « impériale »!  On peut s’en faire une idée avec la gouvernance de l’Union Européenne ou des droits et des gauches en France, de nos jours.
Certes, la tentation du repli sur des  entités plus homogènes, plus compactes peut-elle se comprendre comme d’aimer se retrouver « entre soi »! Citons Sylvie Tissot (Entre soi et les autres
’Actes de la recherche en sciences sociales « Les espaces de l’entre-soi », 2014)
« La notion d’entre soi désigne le regroupement de personnes aux caractéristiques communes, que ce soit dans un quartier, une assemblée politique, ou encore un lieu culturel. Elle sous-entend l’exclusion, plus ou moins active et consciente, des autres. Cette mise à distance d’autrui peut-être revendiquée au nom de la supériorité d’un groupe : les Blancs d’une société ségrégée, les nobles ou grands bourgeois d’un club fermé. »
Pour notre part, nous ne sommes aucunement opposés au communautarisme, ce qui peut sembler quelque peu paradoxal. En effet, le contenant  peut tout à fait garantir l’intégrrité de ses contenus à commencer par le fait que les divers « signifiés »‘  liés,  reliés à un même signifiant, gardent une certaine autonomie. Selon nous, chaque communauté  ne communique avec les autres  que par ses élites et il revient à chaque communauté de les mettre en évidence, selon les valeurs et les repéres qui lui sont propres. Les relations intracommunautaires restent prioritaires par rapport aux relations intercommunautaires lesquelles sont réduites à la portion congrue en termes de temps. Le rapport sexuel est un bon exemple de ce que nous entendons, à savoir qu’il implique une relation entre deux entités bien différentes, les hommes et les femmes, pour un temps relativement bref, ponctuel mais néanmoins vital quant à ses effets.
La notion de contenant  peut correspondre à une forme de syncrétisme, voire de symbiose. Mais il n’est pas question dans une idéologie unidimensionnelle. L’unité de l »ensemble ne signifie aucunement que tous ses éléments constitutifs soient identiques comme d’aucuns n’hésitent pas, semble-t-il, à vouloir nous le faire croire.
On aura donc compris que par révolution copernicienne, nous entendons le même processus qui aura conduit à passer du géocentrisme à l’héliocentrisme. Sur certains plans la révolution copernicienne, laquelle implique un glissement de centralité, n’est pas encore accomplie. Bien pis, nous régresserions en opérant une révolution copernicienne à l’envers.
Il est vrai que la cause du contenant, du signifiant, de ce qui englobe – sans basculer dans la mondialisation! – est de nos jours assez mal défendue et cela n’est pas sans conséquence puisque la plupart de nos crises socio-politiques viennent d’une mauvaise compréhension de l’idée de contenant. Pour notre part, nous avons mis en avant la notion de maisonnée, laquelle comporte un centre et  des éléments qui gravitent autour.
Or, il faut bien reconnaitre qu’un tel modèle n’éveille pas l’engouement de tous et notamment de ceux et celles  qui éprouvent du ressentiment (cf l’ouvrage de Marc Ferro Ressentiment dans l’histoire – Éditions Odile Jacob, 2007) à l’encontre des « dominateurs ». Il y aurait donc là un obstacle épistémologique qui empêcherait d’aborder sereinement un tel modèle.
Mais la France, par exemple, ne saurait  refouler plus longtemps son destin « impérial », dont elle subit actuellement surtout les effets négatifs, notamment en ce qui concerne la question de l’immigration maghrébine.  La seule façon de lutter contre le souverainisme est de réhabiliter la notion de contenant, d’en montrer les vertus créatrices.
Rappelons que la Tour de Babel  incarne cette idée de rassemblement  et que ce sont les « dieux » qui  entendirent punir l’humanité en en bloquant la construction, ce qui conduisit non pas à multiplier les langues mais bien plutôt à une régression antérieure au rapprochement des dites langues. (Genèse XI,  versets .1-9)
  » 1 Toute la terre avait une seule langue et les mêmes mots. 2 Après avoir quitté l’est, ils trouvèrent une plaine dans le pays de Shinear et s’y installèrent. 3 Ils se dirent l’un à l’autre: «Allons! Faisons des briques et cuisons-les au feu!» La brique leur servit de pierre, et le bitume de ciment. 4 Ils dirent encore: «Allons! Construisons-nous une ville et une tour dont le sommet touche le ciel et faisons-nous un nom afin de ne pas être dispersés sur toute la surface de la terre.» 5 L’Eternel descendit pour voir la ville et la tour que construisaient les hommes, 6 et il dit: «Les voici qui forment un seul peuple et ont tous une même langue, et voilà ce qu’ils ont entrepris! Maintenant, rien ne les retiendra de faire tout ce qu’ils ont projeté. 7 Allons! Descendons et là brouillons leur langage afin qu’ils ne se comprennent plus mutuellement.» 8 L’Eternel les dispersa loin de là sur toute la surface de la terre. Alors ils arrêtèrent de construire la ville. 9 C’est pourquoi on l’appela Babel: parce que c’est là que l’Eternel brouilla le langage de toute la terre et c’est de là qu’il les dispersa sur toute la surface de la terre. »
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le contenant  ne vise pas à tout confondre parmi ses contenus mais implique d’établir un modus  vivendi,  où chacun préserve sa spécificité, dans un esprit de tolérance et dans la laïcité et ce n’est pas par hasard que la France ait mis en avant ce terme qui correspond touit à fait à l’esprit d’un Etat  voué à rassembler  largement autour de lui, dont en quelque sorte ce serait le destin comme il est dit dans le Songe de Joseph:(Genése Ch XXVII, 9)  « Et voici, le soleil, la lune et onze étoiles se prosternaient devant moi ».




JHB
12. 07 16

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