La psychologie du racisme
La psychologie du racisme
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Dès le plus jeune âge, lorsque l'enfant apprend une langue, il possède une aptitude à catégoriser ses expériences en créant des concepts. Que cette aptitude soit innée ou acquise suscite encore des différents parmi les chercheurs mais tous semblent être convaincus que le processus cognitif de catégorisation est universel. Dès la naissance, c'est essentiellement à travers ce processus de catégorisation, ou plutôt de conceptualisation, que nous pouvons produire des phrases que nous n'avons jamais entendues auparavant. Ainsi, lorsque l'enfant est exposé aux paires suivantes "un chat, des chats"; "un chien, des chiens", il extrait inconsciemment le concept du pluriel qu'il pourra réappliquer à d'autres mots dont il n'a jamais entendu le pluriel. Il dira alors " un arbre, des arbres" ou encore "un journal, des journals".
Et si cette capacité à conceptualiser n'était pas seulement propre à l'apprentissage d'une langue mais à l'apprentissage de la vie?
On conceptualise constamment les comportements humains
Conceptualiser les comportements humains, c'est extraire une universalité à travers les particularités de l'homme. Nous sommes tous différents et à la fois tous identiques. Cependant, extraire un concept que l'on croit universel peut s'avérer être faux. Tout comme l'enfant a pu se tromper en disant "des journals", il se peut aussi que l'adulte se trompe quant à son analyse des individus de la société dans laquelle il évolue.
Ainsi naît le racisme. C'est l'extraction erronée d'un concept qui lie une valeur intellectuelle, morale, ou même physique à une couleur de peau ou à une religion. Tout comme l'enfant a besoin de multiplier ses expériences afin de modifier le concept du pluriel, l'adulte a besoin de multiplier ses expériences en quantité et qualité afin de confirmer ou d'infirmer son idée qu'il se fait de l'homme. Seulement, cette remise en question des concepts préétablis devient plus difficile lorsque l'on y ajoute la dimension émotionnelle.
Tandis qu'en France, la stéréotypisation du délinquant touche "les Arabes et les Noirs", aux USA, il s'agit des "Blacks et Latinos", en Angleterre ce sont les "Bangladeshis, Jamaïcains, Hooligans etc." En multipliant ces expériences, on se rend compte que le monopole de la criminalité urbaine n'est pas dû à une ethnie ou une couleur de peau. On remet donc en cause le concept de l'appartenance éthnique pour le remplacer par un autre concept: l'appartenance socio-économique. S'il y a une constante dans cette délinquance urbaine qui touche les "pays développés", ce n'est pas la couleur de peau ou la religion mais c'est la marginalisation économique et sociale de ces groupes. Ainsi, plutôt que de dire "la plupart des trafiquants sont arabes et noirs", il serait plus juste de dire "la plupart des trafiquants sont socialement et économiquement marginalisés".
La sphère publique confisque certaines expériences
Tout comme l'enfant dit "des journals" jusqu'à ce qu'il soit exposé à un certains nombre d'expériences, l'adulte a aussi besoin de multiplier ses expériences afin d'affiner sa compréhension de la société. En conséquence, une solution pour combattre le racisme, et par la même, la délinquance, serait de multiplier "l'expérience" avec celui que l'on perçoit comme l'autre. Voilà donc pourquoi il est important d'inclure la minorité avec ses particularités dans la sphère publique, pour qu'elle soit plus visible et donc dédiabolisée. Dans la sphère publique, tant que la minorité sera représentée par une autorité supérieure et qu'elle n'aura pas le droit de se représenter elle-même, il y aura cette xénophobie banalisée et les racistes continueront de dire "des journals".
L'homme extrait donc naturellement des concepts qu'il croit universels à partir de ses expériences dans la société. L'universel ne veut en aucun cas dire qu'il faut détruire les différences. Un principe qui se veut universel mais qui laisse à l'écart certaines particularités de son univers, comme le voile ou la barbe par exemple, n'est plus universel. Il devient alors partiel et, par la même, représente sa première menace de destruction.
"Toute façon, il n'y a pas de race, il n'y a que la race humaine."
Phrase passe-partout qui étouffe le débat. Il existe des races, ou plutôt des ethnicités, qui au fil du temps, se sont croisées pour former de nouvelles ethnicités. Ne pas le reconnaître, ou être mal à l'aise avec l'idée, c'est répondre à l'extrême par un autre extrême. Tandis que le racisme est recroquevillé sur lui même et, de par sa peur de l'autre, lui renvoie sa domination, le "boboïsme" lui, prends la position opposée en clamant que "tout le monde il est beau et content parce qu'il est pareil". L'un repose sur la réaffirmation des différences tandis que l'autre sur la réaffirmation des similarités.
C'est dans ce combat du verre à moitié vide ou à moitié plein que la cohésion sociale est neutralisée et prise en otage. Étant donné que la réalité est complexe, les concepts cognitifs se doivent d'évoluer et d'être complexes pour comprendre au mieux la réalité. Dans cette relation dialectique entre la pensée et la réalité se trouve la clé d'une société plurielle qui accepte sa complexité sans complexe et qui refuse de simplifier la réalité sous la pression de l'émotion.
Le racisme se construit socialement et peut donc être déconstruit socialement.
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